Le Parlement réhabilite les femmes condamnées pour avortement avant 1975
Cinquante ans après la promulgation de la loi Veil, qui a légalisé l’interruption volontaire de grossesse (IVG) en France, le Parlement a adopté à l’unanimité, jeudi 18 décembre, une loi mémorielle visant à réhabiliter les femmes condamnées pour avoir avorté lorsque cette pratique était interdite.
Ce texte reconnaît officiellement la responsabilité de l’État dans les souffrances infligées à des milliers de femmes avant la dépénalisation de l’avortement en 1975. Entre 1870 et cette date, plus de 11 660 personnes ont été condamnées pour avoir pratiqué ou eu recours à des avortements clandestins.
Une reconnaissance historique
Portée par la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, la loi entend « réparer une injustice et restaurer la dignité » des femmes concernées, ainsi que de celles et ceux qui les ont aidées. Elle s’inscrit dans un devoir de mémoire, en reconnaissant que les lois en vigueur avant 1975 ont constitué une atteinte grave à la santé des femmes, à leur autonomie sexuelle et reproductive et, plus largement, à leurs droits fondamentaux.
Ces textes ont provoqué de lourdes souffrances physiques et psychologiques, et parfois même la mort de femmes contraintes de recourir à des avortements clandestins.
Un texte salué par les associations féministes
Les associations féministes ont accueilli favorablement cette adoption. Pour Sarah Durocher, présidente du Planning familial, la portée du texte est avant tout symbolique mais essentielle. « C’est comme un vélo, il faut continuer à pédaler, continuer à obtenir des petites victoires, parce que ce droit reste sans cesse menacé », souligne-t-elle.
Transmission et mémoire collective
La loi prévoit également la création d’une commission chargée de reconnaître le préjudice subi par les femmes ayant avorté clandestinement. Cette instance aura pour mission de recueillir et de transmettre la mémoire de ces parcours, sans oublier celles et ceux qui ont aidé ces femmes à une époque où l’avortement était criminalisé.
Un travail de transmission jugé indispensable par les militantes. « Des femmes sont mortes, ont été emprisonnées, parfois même guillotinées parce qu’elles avaient avorté ou aidé à avorter. Il est essentiel de le rappeler aux jeunes générations », insiste Sarah Durocher, qui intervient régulièrement dans les établissements scolaires.
Pas de réparation financière
Le texte ne prévoit toutefois aucune indemnisation financière pour les victimes. Laurence Rossignol rappelle que certaines personnes impliquées dans les avortements clandestins de l’époque — comme les « mères maquerelles » ou des proxénètes — ne relevaient pas d’une démarche de soutien aux femmes, ce qui rendait complexe toute réparation matérielle.
Un droit désormais constitutionnel
Depuis le 8 mars dernier, l’avortement est reconnu comme un droit fondamental inscrit dans la Constitution française. Pour les associations féministes, cette loi mémorielle s’inscrit pleinement dans cette dynamique : celle d’affirmer, sans ambiguïté, que l’accès à l’IVG est un droit fondamental, inaliénable et une condition essentielle de l’égalité entre les femmes et les hommes.



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