Le consentement entre officiellement dans la définition pénale du viol

Le Parlement français a adopté définitivement, mercredi 29 octobre, une réforme historique du code pénal intégrant la notion de consentement dans la définition du viol. Un tournant majeur pour la justice et la lutte contre les violences sexuelles.


Une adoption transpartisane et unanime

Après plusieurs mois de débats, le Parlement a entériné mercredi une évolution majeure du droit pénal français : la prise en compte explicite du consentement dans la définition du viol et des agressions sexuelles.
Le texte, porté par les députées Marie-Charlotte Garin (Ecologiste) et Véronique Riotton (Renaissance), a été adopté à l’unanimité par le Sénat, après un large soutien à l’Assemblée nationale la semaine précédente.

La nouvelle rédaction du code pénal sera claire :

« Constitue une agression sexuelle tout acte sexuel non consenti. »

« Nous venons d’obtenir une victoire historique », ont réagi les deux élues dans un communiqué commun, saluant « une avancée majeure dans la lutte contre les violences sexuelles ».
« Ce texte envoie un signal fort : nous passons collectivement de la culture du viol à la culture du consentement », a ajouté Véronique Riotton.

Le président Emmanuel Macron doit promulguer la loi dans les prochains jours.


Un consentement “libre, éclairé, spécifique et révocable”

Le texte introduit pour la première fois une définition précise du consentement, désormais décrit comme “libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable”.
Il ne pourra jamais être déduit du silence ou de l’absence de réaction de la victime.
La loi précise également qu’il n’y a pas de consentement si l’acte sexuel est commis sous la contrainte, la menace, la surprise ou la violence, reprenant ainsi les critères existants mais en inversant la logique d’analyse des faits.

Pour la députée Marie-Charlotte Garin, cette réforme « va permettre une meilleure appréciation de nombreux cas qui échappaient jusqu’ici à la justice ».
Actuellement, près de 73 % des plaintes pour viol ou agression sexuelle sont classées sans suite.

« Le non-consentement devient désormais central pour qualifier l’infraction », explique-t-elle.
« Les enquêteurs et magistrats devront interroger le comportement de l’auteur, et non plus seulement celui de la victime. »


La France rejoint les pays européens pionniers

Avec cette réforme, la France rejoint une dizaine de pays ayant déjà inscrit la notion de consentement au cœur de leur législation : le Canada, la Suède, l’Espagne, la Norvège (depuis le printemps 2025), ou encore l’Islande.

Ce changement intervient dans un contexte de forte mobilisation sociétale autour des violences sexuelles.
L’affaire Mazan, qui avait ému la France au printemps, a joué un rôle de catalyseur : durant ce procès hors norme, Gisèle Pelicot, victime pendant dix ans de viols commis par son mari et cinquante autres hommes, avait fait du consentement un thème central du débat public.


Une année de travail et de débats

Cette adoption est l’aboutissement d’un travail de près d’un an mené conjointement par les députées Garin et Riotton et la sénatrice Elsa Schalck, rapporteure du texte au Sénat.
« Nous avons désormais un texte clair et lisible sur la notion de consentement », s’est-elle félicitée auprès de l’AFP.

Le chemin a pourtant été semé d’embûches.
Certains juristes et associations féministes craignaient une inversion de la charge de la preuve, obligeant les plaignantes à démontrer qu’elles n’étaient pas consentantes. D’autres redoutaient une “contractualisation” des rapports sexuels, jugée contraire à l’esprit du droit pénal.


Des critiques à l’extrême droite et quelques réserves

Le Rassemblement national a été le seul groupe à s’opposer frontalement à la réforme.
Sa députée Sophie Blanc a dénoncé une « dérive morale et juridique sans précédent », craignant que « les avocats ne dissèquent désormais les gestes, les mots ou le silence de la victime plutôt que la violence du coupable ».

Certaines figures de la gauche ont aussi exprimé des réserves.
La sénatrice socialiste Laurence Rossignol s’est abstenue, regrettant le choix du terme “consentement”, qu’elle juge « archaïque » :

« Consentir n’est pas vouloir », a-t-elle rappelé sur X (ex-Twitter).


Une loi qui devra être accompagnée

Les associations saluent une avancée majeure, tout en soulignant la nécessité d’un accompagnement concret.
La Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIDFF) appelle à renforcer l’éducation à la vie affective et sexuelle, ainsi que la formation des magistrats, policiers et gendarmes.

« L’évolution du droit ne suffira pas sans transformation culturelle et formation des acteurs de terrain », a rappelé l’organisation.

Avec cette réforme, la France franchit une étape symbolique et juridique vers une justice davantage centrée sur la parole des victimes et le respect du consentement.

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