Épidémie bovine : la ministre de l’Agriculture sous pression dans le Sud-Ouest
La tension reste vive dans le Sud-Ouest de la France, où des éleveurs de bovins poursuivent, dimanche, des actions de blocage à la veille de la venue en Occitanie de la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard. En cause : la gestion gouvernementale de l’épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC), vivement contestée par plusieurs syndicats agricoles.
Des barrages ont été signalés dans de nombreux départements. « Il y a de nouveaux blocages en cours, le mouvement continue et se développe », a déclaré à l’AFP Bertrand Venteau, président de la Coordination rurale. Comme la Confédération paysanne, ce syndicat dénonce l’abattage systématique des troupeaux dans les foyers infectés et réclame une vaccination élargie des 16 millions de bovins français contre cette maladie, non transmissible à l’homme.
À Carbonne, en Haute-Garonne, point de départ d’une précédente mobilisation agricole en janvier 2024, Cédric Baron, éleveur, affirme être prêt à durer : « On est parti pour passer les fêtes ici. » Même détermination dans le Tarn, où une cinquantaine d’agriculteurs bloquent la nationale N88 à l’entrée de la rocade d’Albi. « Nous sommes en guerre. Tant que l’État ne renoncera pas à l’abattage massif, on restera mobilisés », prévient Cédric Nespoulos, producteur de bovins viande.
À Millau, une vingtaine de tracteurs ont déversé lisier, foin, pneus et ordures devant la sous-préfecture de l’Aveyron. D’autres actions ont eu lieu près de Montpellier, à Saint-Jean-de-Luz, ainsi que de nouveaux appels à bloquer des axes en soirée à Bordeaux et en Dordogne. Dans l’Hérault, le sous-préfet de Lodève évoque une mobilisation « limitée », mais reconnaît de « fortes difficultés » en Lozère et dans l’Aveyron, notamment sur l’A75.
Sur les barrages, de nombreux éleveurs disent avoir été choqués par l’utilisation de gaz lacrymogènes par les gendarmes, en milieu de semaine en Ariège, pour disperser des manifestants qui tentaient d’empêcher l’accès des vétérinaires à une exploitation touchée par un premier cas de DNC. « Abattre une bête malade, tout le monde peut le comprendre. Mais éliminer des troupeaux entiers, alors qu’il faut des années pour construire une génétique et un cheptel, c’est inacceptable », estime Christophe Guénon, éleveur bio près de Bordeaux.
La ministre de l’Agriculture, soutenue par l’alliance syndicale majoritaire FNSEA–Jeunes Agriculteurs, défend un « protocole qui a très bien fonctionné » depuis l’apparition du premier cas en France en juin dernier, en Savoie. Elle assurait samedi dans Sud Ouest qu’il n’existait « aucun foyer actif de DNC sur le territoire français ». Dimanche sur Europe 1, elle a également affirmé que « le virus n’est pas aux portes de chaque élevage ».
Lundi, Annie Genevard se rendra en Occitanie pour assister au lancement de la vaccination de près d’un million de bovins. Le gouvernement reste toutefois prudent sur une généralisation du dispositif. Une vaccination à grande échelle « placerait la France en zone à risque et ferait peser un danger économique sur l’ensemble de la filière », a expliqué dimanche Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l’Industrie.
De son côté, la présidente socialiste de la région Occitanie, Carole Delga, a adressé une lettre ouverte au Premier ministre Sébastien Lecornu, lui demandant d’« intervenir afin de garantir, dans les plus brefs délais, un dialogue franc et sincère avec les agriculteurs ». La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a répondu que ce dialogue était déjà « permanent » et que le protocole en place restait « le plus efficace ».
Cette crise sanitaire s’ajoute à d’autres motifs de colère dans le monde agricole, comme la baisse annoncée du budget de la Politique agricole commune (PAC) européenne ou encore le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur. « Dans sa forme actuelle, le traité n’est pas acceptable », a répété le ministre de l’Économie, Roland Lescure, dans une interview accordée notamment au quotidien Les Échos.



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